Johan Unenge – Ma vie extraordinaire

par Dareel
Johan Unenge - Ma vie extraordinaire

Comme beaucoup d’adolescents, Mattias ne sait pas trop où il en est. Il passe son temps libre à jouer à un jeu vidéo très violent, avec son meilleur ami. Il est amoureux d’Alva, mais elle semble proche d’Albin, un garçon populaire et ouvertement xénophobe. Le père de Mattias est policier et doit faire face à des agressions contre des immigrés. Quand l’unique usine de la ville ferme, de nombreux habitants se retrouvent au chômage. La communauté s’échauffe de plus en plus contre les étrangers, et de véritables chasses à l’homme sont organisées. Mattias se sent à peine concerné par ces événements car il ne pense qu’à Alva. Mais un jour, un jeune noir frappe à sa porte, en disant ces simples mots : “please, help me…”.

UN FORMAT HYBRIDE ORIGINAL

Tout d’abord, impossible de ne pas saluer la forme que prend ce roman, qui le rend original et très facile et rapide à lire ; on parle ici d’un roman semi-graphique, semi-classique. En effet, les pages de textes alternent avec les pages type “BD” sans qu’il y ait pour autant de coupure de l’histoire. Le tout s’enchaîne parfaitement et évite de nous faire tomber dans un sentiment de lassitude au fur et à mesure de la lecture.

LE RACISME ET L’INTEGRATION AU COEUR DU DEBAT

Nous faisons donc la connaissance de Mattias, adolescent suédois issu d’une famille classique ; un large groupe d’immigrants sans papiers vient de pénétrer dans sa petite ville et le débat est lancé de savoir ce qu’il faut faire d’eux. Or, le papa de Mattias est policier, il se doit donc de faire régler l’ordre et respecter la loi. Sa maman est quant à elle bibliothécaire, et prend partie pour ces misérables voyageurs qui ont besoin d’aide, et selon aide, avec qui il faut tout partager.

Le débat commence à faire rage dans l’école de Mattias, entre matchs de baskets dont la star de l’équipe locale est également menacé d’expulsion, car il est peu probable que son titre de séjour soit renouvelé, et premiers émois amoureux avec Alva, la jolie blonde discrète de la classe.

On a ainsi affaire à Helena, écolière fervente partisane de l’intégration des immigrés, et également à tout un groupe d’écoliers mené par Albin, qui a peur de ces étrangers qui menacent soit disant de voler leurs emplois ; pour éviter ça, ils se donneront pour mission de les pourchasser.

Seulement voilà, Mattias n’a pas franchement d’avis sur la question et est plutôt du genre obsédé par Alva. Jusqu’à ce qu’un jour, un jeune noir vienne frapper à sa porte et lui demande de l’aide. Mattias doit alors agir d’une manière ou d’une autre dans le plus grand secret, et sa réflexion s’en voit donc toute chamboulée. Faut-il aider ces gens ? Et s’ils menaçaient sa famille ? Est-il juste de les laisser être pourchassés et renvoyés chez eux ? Est-il prêt à supporter cet élan général de racisme qui flotte dans l’air ?

UN ROMAN QUI LAISSE SUR SA FAIM

D’une manière générale je vois que ce roman a été très plébiscité ; je suis également tout à fait enthousiaste à son sujet, il est un superbe support pour pouvoir aborder le sujet, entamer la discussion et ouvrir le débat, notamment parmi les jeunes.

Mais je ne sais pas, il me manque un petit quelque chose, même si la fin du roman laisse transparaître quelques éléments. On dirait que l’auteur n’a pas osé prendre totalement partie, ou a choisi de laisser chacun se faire sa propre réflexion. Je ne dis pas qu’il faut toujours un happy ending dans les histoires, loin de là, mais peut-être le rôle de ce livre aurait pu être un peu plus éducatif si l’auteur était allé plus loin.

J’ai donc été surprise, même si clairement de nombreux éléments nous montrent ce qu’il faut en retenir : chacun est concerné, on ne peut pas ignorer le problème, et c’est une fois qu’on y est confronté qu’on apprend parfois à se découvrir soi-même, et à fixer les limites de sa tolérance, peu importe envers qui.

Je recommande donc cette lecture, à mettre entre les mains des enfants et adolescentes, mais aussi pourquoi pas de nombreux adultes dont la réflexion mérite d’être stimulée.

– Merde alors, ils prennent nos emplois ! a hurlé Albin.

Il était devenu tout rouge.

Helena et son sourire arrogant. Pas étonnant que ça le mette hors de lui. Mais sa colère ne paraissait avoir aucune effet sur elle. Elle a simplement attendu qu’il ait fini de crier, puis elle a rétorqué :

– Les réfugiés prennent nos emplois ?

– Tous ces cons qui viennent ici pour vivre d’allocation.

– Crois-tu que les réfugiés, quand il se cachent dans les abris, se disent “Bon, pourquoi ne pas partir d’ici et aller vivre des allocations en Suède ? Mais oui, c’est une bonne idée. On fait nos bagages, on file entre les bombes, on traverse la frontière sous un camion, puis on s’entasse dans un conteneur avec une centaine d’autres, par cinquante degrés de chaleur. En plus, pour ça on paie dix mille balles. Et puis on se retrouve au bureau des services sociaux en Suède. Oui, quelle idée géniale !”

– T’es complètement stupide.

– Et toi, t’es aryen, hein ?

– Plus que toi, en tout cas.

Johan Unenge

(Par contre, en tant que fervente fan de Mortal Kombat, je n’ai pas du tout reconnu le jeu vidéo dont il a beaucoup été question dans le roman. ^^)

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